- Lieutenant François Boigne (-de)
Nationalité française
- Breveté pilote militaire le 25 août 1916 (brevet n°4340)
- Cité dans le communiqué aux armées du 0000
- Escadrilles N 82, SPA 69
- Né le 18/08/1896 à Noyon (Oise)
- Mort le 23/08/1970 à Neuilly (Hauts-de-Seine) (Mort naturelle.)
Décorations
- Chevalier de la Légion d’Honneur
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Croix de Guerre
5 palme(s)
François Boigne (-de)
6 victoires sûres, 2 victoires probables
Palmarès détaillé »
François, Eugène, Marie, Antoine de Boigne voit le jour à Noyon, dans l’Oise, le 18 août 1896. Contrairement aux apparences, c’est en Savoie, dans la ville de Chambéry, que se situent ses attaches familiales : il est issu d’une illustre famille de la noblesse du département, ayant donné des générations de notables, le fondateur de la « dynastie » étant Benoist Le Borgne (1751-1830), devenu Benoît Le Boigne, aventurier ayant fait fortune aux Indes et devenu un partisan monarchiste comblé d’honneurs par Louis XVIII. Son petit-fils, Charles Marie Ernest de Boigne (1829-1895) devient député et Maire de Chambéry et a un fils, Elzéar de Boigne, qui décide de faire carrière dans l’armée. Marié à la fille d’un comte, Mlle Hélène de Mandat de Grancey, il est lieutenant de cavalerie au 9e cuirassiers de Noyon quand naît François. Mais il se tue lors d’une chute de cheval en 1902 et le jeune garçon va être élevé avec son frère cadet par sa mère connue sous le nom de la comtesse Elzéar de Boigne, qui réside au château du Buisson-rond de Chambéry et qui va rester très active dans la vie mondaine de l’époque, la presse signalant tous ses déplacements en villégiature, dont le quotidien monarchiste l’Action Française auquel elle est une fidèle abonnée. Elle veille à offrir une éducation soignée à ses enfants.
Quand la guerre éclate au mois d’août 1914, François est un étudiant de 18 ans qui n’a pas encore effectué ses obligations militaires et n’est pas encore mobilisable. Il décide néanmoins de s’engager volontairement pour participer aux combats, en se rendant le 11 novembre 1914 au bureau de recrutement de la Mairie de Chambéry, muni de l’autorisation de sa mère. Il est alors incorporé comme simple soldat de 2e classe au 9e régiment de Hussards où il suit ses classes et va rester affecté au dépôt de son régiment plusieurs mois où il va recevoir ses galons de brigadier en mars 1915. Ce n’est que le 27 mai 1915 qu’il part pour le front retrouver le gros de son régiment alors affecté comme unité de seconde ligne dans les tranchées en Champagne – plusieurs détachements participant à l’attaque de Champagne au mois de septembre 1915, avant de se retrouver affectés dans un secteur calme du front près de Montbéliard, près de Belfort. L’attaque de Verdun envoie le 9e hussards sur le secteur où il ne sert qu’à faire la police à l’arrière des lignes. Durant toute cette période le brigadier de Boigne sert au 2e escadron du régiment, plus à combattre l’ennui que l’ennemi si l’on en croit le registre des punitions où il récolte près de 40 jours de consigne cumulés pour divers actes de négligence dans la vie de garnison ou actes de mauvaise humeur vis-à-vis de ses supérieurs.
Il se porte alors volontaire pour intégrer le service aéronautique et y est accepté comme élève-pilote en juin 1916, gagnant les écoles de pilotage d’où il sort breveté et affecté à l’escadrille N 82 le 2 janvier 1917. L’unité stationne alors sur le terrain de Fontaine près de Belfort, dans un secteur du front qui est réputé plutôt calme. Il y restera jusqu’au mois d’avril 1917, date à laquelle l’unité est affecté sur le terrain de Bonnemaison (Lhéry) en Champagne pour participer à l’offensive aérienne consécutive à l’attaque du Chemin des Dames, où les combats aériens prennent une toute autre ampleur. C’est là que le brigadier François de Boigne obtient sa première victoire aérienne aux commandes de son Nieuport, le 3 mai 1917, en abattant avec son chef d’escadrille le capitaine Echard un avion ennemi qui tombe dans les lignes françaises. Cité et promu au grade de maréchal des logis, il reste sur ce secteur avec son escadrille jusqu’au 4 novembre 1917, date à laquelle celle-ci s’envole pour l’Italie.
Suite à la défaite de Caporetto, l’armée italienne a entamé une retraite chaotique vers l’ouest et n’a pu se rétablir que le long de la rivière Piave, au prix de l’abandon d’une grande partie de son matériel lourd dont la moitié de ses avions – son effectif tombant à 200 appareils en ligne. L’escadrille N 82 est alors envoyée de l’autre côté des Alpes pour secourir l’allié Italien, en compagnie de plusieurs autres escadrilles de corps d’armée, et d’une autre escadrille de chasse, la SPA 69. Les Nieuport 27 de l’escadrille N 82 sont reconnus par le chef de l’aviation française en Italie comme des appareils inférieurs aux avions allemands. Mais l’ennemi qui fait face aux français sur ce front est l’aviation autrichienne, dont le matériel est loin d’être à la hauteur de celui de son allié allemand, ce qui permet aux pilotes français de la N 82 d’affronter l’ennemi sur un pied d’égalité. Installée à Vérone le 4 novembre 1917, la N 82 a plus à risquer du climat hivernal et à la configuration du front, fait de montagnes, que de l’action de l’aviation ennemie. La plupart des pertes viennent de pilotes s’écrasant dans la nature suite à une panne mécanique, et n’ayant aucun terrain plat où se poser… Pour le maréchal des logis François de Boigne, le ciel d’Italie sera synonyme de succès. Il est promu au grade de sous-lieutenant le 26 janvier 1918 et le mois suivant, le 24 février 1918, il va remporter un « doublé » en abattant deux appareils autrichiens obtenus en collaboration avec le capitaine Echard – l’un tombant sur le Monte Paole, l’autre au nord de Possagno. Ce nouvel exploit lui vaut une citation à l’ordre de l’armée en date du 28 mars et la médaille de bronze de la valeur militaire italienne. Le 23 mars 1918, il revendique à nouveau un avion qui tombe sur la ville de Montebello mais qui ne lui sera pas homologué, puis, le 25 mars 1918, tombe sous son tir un biplace au nord de Montebelluna qui lui est homologué en collaboration avec le sergent Bolland, sa 4e victoire comme le précise sa nouvelle citation à l’ordre de l’armée en date du 21 mai 1918. Avec ses trois victoires sûres et une probable, il est le meilleur pilote de chasse français en Italie. Ses succès sont salués par le commandant Houdemon, chef de la mission militaire aéronautique française, qui note le côté impétueux de son pilote de 21 ans qu’il considère par ailleurs comme « très jeune de caractère et peu sérieux. »
Revenu en France le 10 avril 1918 à Etampes, il part immédiatement pour le front dans l’Oise avec la N 82, rééquipée en chasseurs SPAD, pour tâcher de contenir l’offensive allemande lancée sur le secteur dans l’espoir d’obtenir une victoire décisive avant l’arrivée des troupes américaines. C’est là qu’il va obtenir ses derniers succès : il abat en collaboration avec deux équipiers un chasseur sur Craonne le 27 mai 1918, ce qui lui vaut une nouvelle citation en date du 16 juin 1918. Sa dernière victoire homologuée sera obtenue seul, le 19 juillet 1918. Muté à l’escadrille SPA 69 le 16 septembre 1918, il va terminer la guerre en Lorraine avec un score final de 6 victoires homologuées et deux probables.
Restant quelques mois de plus en escadrille, il est démobilisé le 17 juillet 1919, et rendu à la vie civile. Il se retire au château familial du Buisson-Rond à Chambéry et doit songer à sa reconversion. Pour cela il va suivre le chemin de son lointain ancêtre parti à l’aventure en Inde : il deviendra en 1926 instructeur de vol en Chine au Shantoung, où il ouvre une école d’aviation à la demande du seigneur de guerre local et où il y ajoute près de 400 heures sur son carnet de vol.
Revenant en France après l’année 1932, il va trouver un emploi à la direction commerciale de l’usine Bugatti de Molsheim, étant intime avec la direction de la société puisqu’il fréquente la fille du célèbre constructeur italien, Mlle Lidia Bugatti, qu’il va épouser le 11 mars 1940 en présence de nombreuses personnalités.
Quand éclate la seconde guerre mondiale, il est de nouveau mobilisé avec son grade de lieutenant : ayant complètement négligé ses périodes d’instruction dans la réserve, il a été promu à ce grade en 1924 et n’a reçu d’autre avancement. Dès sa mobilisation, il obtient à la demande de sa direction une affectation spéciale à l’usine Bugatti de Molsheim qui se replie à Bordeaux. Son affectation spéciale ne sera pas renouvelée et le 16 mai 1940 il va se retrouver affecté à la base aérienne de Tours, au bataillon de l’air n°109.
Démobilisé après la débâcle, il se retire à Chambéry au Buisson-Rond et aucun détail n’est connu sur son action durant l’occupation, ne figurant pas parmi les membres de la résistance ni de la collaboration. L’armée de l’air le radie de ses cadres le 18 août 1948 une fois atteint la limite d’âge de son grade. Actif dans la vie mondaine et fréquentant les frères Kennedy dans les années 1950, il décède le 23 août 1970 à l’hôpital américain de Neuilly.
Sources
- Dossier individuel SHD n°1P 20131/2