- Sergent ou Maréchal des logis Jean Gaillard de la Valdène (-de)
Nationalité française
- Breveté pilote militaire le 17 janvier 1916 (brevet n°2408)
- Cité dans le communiqué aux armées du 0000
- Escadrilles MF 123, SPA 95
- Né le 2/09/1895 à Tresserve (Savoie)
- Mort le 26/08/1977 à Lausanne (Suisse) (Mort naturelle)
Décorations
- Médaille Militaire
-
Croix de Guerre
5 palme(s)
Profils
Jean Gaillard de la Valdène (-de)
5 victoires sûres, 7 victoires probables
Palmarès détaillé »
Pierre Marie Joseph Jean (prénom d’usage) de Gaillard de la Valdène voit le jour le 2 septembre 1895 sur la commune de Tresserve, près d’Aix des Bains, où ses parents sont en vacances. C’est un couple d’aristocrates fortunés dont le père, le comte Henry Joseph Léopold de Gaillard de la Valdène, est un militant royaliste de l’Action Française. Le jeune garçon, 4e enfant d’une famille qui en comportera sept, va grandir dans les diverses propriétés de ses parents, principalement le château de Bellevue sur la commune de Bollène sur les bords du Rhône, mais aussi à Nice et Paris où son père est président des comités royalistes de la capitale. Recevant une éducation soignée, le jeune homme obtient son baccalauréat ès-sciences, et, passionné par l’aviation naissante, se destine à intégrer la nouvelle école d’aéronautique supérieure pour laquelle il entre en classe préparatoire.
La guerre vient contrarier ses projets. Trop jeune pour avoir effectué son service militaire, Jean de Gaillard de la Valdène décide de s’engager volontairement dans l’armée pour une durée de 4 ans à la mairie du 16e arrondissement de Paris, se retrouvant incorporé au 3e régiment de dragons à Nantes. Il le quitte dès le mois de décembre 1914, probablement sans avoir connu le front, pour intégrer les écoles de pilotage de l’aéronautique militaire. Mais il ne va pas mener sa formation à son terme car, victime d’une chute d’avion le 10 juin 1915 qui le blesse à la jambe à laquelle s’ajoute sans doute les effets d’un trop fort caractère, il va être renvoyé dans son corps d’origine le 25 juillet 1915 pour raison disciplinaire alors que lui a pourtant été accordé le brevet de pilote civil sur Farman le 12 juillet 1915… De retour au dépôt du 3e dragons à Nantes, il y est réformé car sa blessure à sa jambe se révèle consécutive à une ostéomyélite, une déformation osseuse d’origine infectieuse. Il en faut plus pour décourager le jeune homme, qui, après s’être refait une santé chez ses parents à Paris, va le 24 novembre 1915 se réengager de nouveau au bureau du 16e arrondissement de Paris. On ne sait trop comment il parvient à convaincre les médecins, toujours est-il qu’il dirigé vers les écoles de pilotage dont il ressort breveté, et affecté avec le grade de brigadier à l’escadrille MF 123 à la fin du mois de février 1916.
L’unité est une escadrille de bombardement du GB 4 dirigé par le capitaine Happe où les pertes sont nombreuses mais les décorations faciles à obtenir. Jean Gaillard de la Valdène montre qu’il n’a pas froid aux yeux en s’y portant volontaire ; dès sa première mission le 14 mars 1916 il va avec son mitrailleur abattre un avion ennemi le 14 mars 1916. Happe le décore aussitôt de la médaille militaire, il en tire une grande célébrité car son combat à un contre quatre est mentionné dans le communiqué aux armées du 14 mars 1916, sans que soit mentionné son nom, mais qui est révélé par le journal royaliste « L’action française » qui salue l’exploit militaire du fils d’un de ses plus éminents militants. Le jeune pilote va réaliser nombre d’autres missions au sein du GB 4 durant le restant de l’année 1916 et de nouveau se distinguer le 12 octobre 1916 en remportant deux victoires lors du fameux raid sur Oberndorf contre un chasseur Fokker Eindecker et un biplace. Il est alors promu au grade de maréchal des logis mais va être victime d’une chute à l’atterrissage le 6 décembre 1916, qui va lui occasionner une nouvelle blessure à sa jambe diminuée par l’ostéomyélite.
Il est alors quitte pour plusieurs mois d’hôpital et revient dans la zone des armées le 15 avril 1917, dans une mystérieuse unité, le « Groupe 199 » qui est peut-être une des dénominations du groupe Gouin, unité spécialisée dans les missions spéciales. Quelle que soit son affectation, il s’y entend mal avec son chef qui le dégrade au rang de brigadier le 31 mai 1917. De nouveau blessé à la jambe le 5 août, il va connaître plusieurs affectations dans le bombardement, finissant l’année sur Breguet 14 à l’escadrille BR 120, avant d’être finalement muté dans la chasse à l’escadrille SPA 95 du capitaine Hugues durant l’été 1918, en ayant retrouvé son grade de maréchal des logis. L’unité est regroupée avec trois autres pour former le GC 19 commandé par l’as Deullin, et intégrée dans la Division Aérienne qui est de tous les combats contre l’aviation allemande. Il va vite se révéler aussi efficace aux commandes d’un chasseur SPAD qu’il ne l’était deux ans plus tôt aux commandes d’un Farman, puisqu’il va revendiquer pas moins de neuf victoires aériennes dont seulement deux lui seront homologuées, portant son tableau de chasse à 5 succès officiels et obtenant le grade de sous-lieutenant.
Resté quelque temps à son escadrille en Allemagne occupée, il est démobilisé en novembre 1919 et rendu à la vie civile. Le jeune aristocrate va dès lors mener une vie mondaine bien remplie, profitant de sa fortune familiale pour voyager à travers le monde, tout en continuant à piloter son propre avion de tourisme (un Potez VIII, puis un Caudron C.600 Aiglon dans les années trente). Sa vie sentimentale va être pour le moins agitée, puis qu’il épouse une aristocrate pur jus en 1928, ce qui fait les délices de la presse mondaine. Mais le mariage ne dure pas et le divorce ne tarde pas à suivre. Il rencontre alors lors de ses voyages la championne de tennis espagnole Elia Maria González-Álvarez, dite Lili Alvarez, entre autres trois fois finaliste à Wimbledon. Il l’épouse à Madrid en 1935 où, correspondante du journal britannique Daily Mail, elle va rédiger plusieurs articles durant la guerre d’Espagne, tout en continuant à participer aux championnats de tennis où la presse la désigne désormais sous le nom de comtesse de la Valdène bien que le titre de comte ne soit juridiquement pas confié à Jean de Gaillard de la Valdène à la mort de son père en 1931, mais à son frère ainé Léopold. Se déplaçant à travers l’Europe et ayant une résidence dans le Surrey en Angleterre, ce couple moderne et glamour a de nombreuses activités suivies par la presse « people » de l’époque car Madame pratique également le ski alpin, l’équitation et la course automobile, tout en militant pour la cause des femmes. Une petite fille va naître de cette union, mais va décéder prématurément. Le couple ne survit pas à l’épreuve et se sépare en 1939.
Quand survient la seconde guerre mondiale, Jean de Gaillard de la Valdène est célibataire et a des résidences à Rabat au Maroc ainsi qu’à Hartford, dans le Connecticut (USA). Il est à la tête de plusieurs affaires industrielles et se retrouve mobilisé dans l’armée de l’air à 44 ans en tant que lieutenant de réserve, affecté comme commandant en second de l’école élémentaire de pilotage d’Evreux. Muté à Etampes en avril 1940 d’où il passe dans l’inspection générale de la chasse, il est à Arras lors de l’invasion allemande et parvient à échapper à la captivité en se mêlant aux colonnes de l’exode. Il est à Bayonne le 22 juin 1940 et embarque sur le chalutier armé « Président Houduce », qui part en direction de Casablanca. Plusieurs officiers français sont présents à bord, dont l’enseigne de vaisseau Philippe de Scitivaux, aviateur de l’aéronavale blessé durant la campagne. Apprenant en mer la signature de l’armistice, De Scitivaux et Jean de Gaillard de la Valdenne réussissent à convaincre le capitaine, le LV Favreau, de détourner le navire sur Gibraltar ne serait-ce que pour y décharger sa cargaison d’officiers polonais. Ils doivent faire face en route à une mutinerie de marins qui veulent s’y opposer en volant un fusil mitrailleur. Une fois à Gibraltar, le navire se rallie à la France Libre dirigée localement par l’amiral Muselier, qui a quitté Marseille sur un cargo détourné. L’amiral va chercher à rallier d’autres officiers français présents en Afrique du Nord et va y envoyer en mission le Lt Jean de Gaillard de la Valdène, qui quitte Gibraltar sur un navire britannique pour l’Afrique du Nord. Présent à Alger, il se fait officiellement démobiliser et va déclarer se retirer dans sa résidence de Hartford, dans le Connecticut. Il rencontre plusieurs officiers français mais l’attaque britannique sur la flotte à Mers-el-Kébir réduit réduit à néant tous ses efforts de recrutement... Il va rentrer à Gilbraltar le 2 septembre 1940, puis partir deux jours plus tard vers l’Angleterre à bord du navire SS Royal Scottman.
C’est là qu’il signe son engagement dans la France Libre sous le pseudonyme de « Jean Lorraine », et va être immédiatement affecté à l’état-major du Vice-Amiral Muselier, avec le grade de lieutenant de vaisseau. Muselier est à l’époque chargé de la direction des forces aériennes françaises libres et à ce titre Jean de Gaillard de la Valdène effectue le 8 février 1941 une mission sur la base d’Odiham, qui sert de dépôt aux aviateurs et appareils ralliés de France occupée. Le 13 janvier 1941, il est nommé par Muselier sous-chef de l’Etat-major de l’air. Mais il ne va pas rester longtemps à ce poste, car le général de Gaulle a d’autres projets pour lui. Le 21 février 1941, il est désigné par ce dernier en étant nommé capitaine de corvette pour une mission de représentation de la France Libre aux Etats-Unis, lui demandant de rallier l’opinion publique américaine à la cause de la France Libre. Il part pour l’Amérique en juin et juillet 1941, revient à Londres, et repart le 13 août pour les Etats Unis avec le grade fictif de lieutenant-colonel en étant membre de la délégation du comité national français du général Valin.
Ce dernier le propose en janvier 1942 comme chef de la mission de la France Libre au Canada, mais De Gaulle souhaite l’envoyer en Chine. Cette affectation du bout du monde ne plait pas à l’intéressé qui la refuse, ce qui provoque la colère du général de Gaulle qui ne veut plus des services de cet officier au trop fort caractère. Refusant de retourner à Londres sur ordre du général De Gaulle, il est alors radié des Forces Aériennes Françaises Libres. Il va finir la guerre sans jouer le moindre rôle militaire aux États-Unis, où il épouse une américaine et fonde une famille de deux enfants. N’ayant reçu aucune décoration pour son action dans la France Libre, il se battra en justice pour que son grade de lieutenant-colonel soit reconnu, obtenant satisfaction en 1952 où il réintègre les réserves de l’armée de l’air avec le grade de commandant – une victoire toute symbolique car il en est radié peu après pour avoir atteint la limite d’âge. Divorcé en 1960 avec son épouse américaine, il voyage toujours à travers le monde et s’éteint à Lausanne en Suisse le 26 août 1977.
Sources
- Dossier individuel SHD cote 1P 30615/1