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cocarde française

As 14 - 18

Les as français de la Grande Guerre

Décorations

Profils

Jean-François Jannekeyn

5 victoires sûres, 0 victoires probables
Palmarès détaillé »

Jean-François Jannekeyn naît le 16 novembre 1892 à Cambrai dans une famille de la classe moyenne où son père est un ancien sous-officier d’active devenu officier d’administration militaire. Il grandit dans le Nord et en 1911 réussit le concours de l’école militaire de St-Cyr, au milieu du classement. Il est alors affecté pour une année dans la troupe à compter du mois d’octobre 1911, puis effectue sa scolarité dans la prestigieuse école qu’il quitte avec le grade de sous-lieutenant en octobre 1913 pour servir au 6e régiment de dragons d’Evreux. Il est à l’école d’application de la cavalerie de Saumur quand la guerre vient interrompre sa formation.

Rappelé à son unité, il combat avec elle à Sedan puis dans les Flandres. Promu au grade de lieutenant à la fin de l’année 1914, il va passer près de deux ans et demi en première ligne, mais en tant que fantassin comme la plupart des unités de cavalerie qui deviennent inadaptées à la guerre des tranchées. Obtenant au total trois citations, il est muté au 4e régiment de cuirassiers au mois de juin 1916, et, sans doute lassé par cette vie de cavalier démonté, se porte volontaire pour le service aéronautique.

Il y est accepté en mai 1917 et intègre les écoles de pilotage, obtenant son brevet le 5 juillet 1917. Il part ensuite à l’école d’Avord en perfectionnement mais ne se montre pas de toute évidence parmi les plus doués au pilotage puisqu’il est désigné pour l’aviation de bombardement, ce qui le fait effectuer un stage à l’école de Clermont-Ferrand avant de revenir à Avord. Il va être affecté au mois de novembre 1917 à l’escadrille SOP 132 stationnant à Luxeuil et y effectue ses premières missions de bombardement sur Sopwith 1B2. L’escadrille est regroupée avec les SOP 131 et 134 pour former le GB 4 dont les appareils effectuent en commun des missions sur la Lorraine et sur les Vosges, jusqu’à la fin du mois de mars 1918 où toutes seront rééquipées de bombardiers Breguet 14B2.

Ainsi rééquipé, le GB 4 est intégré au mois de mai dans la Division Aérienne et va conduire de nombreux raids de bombardements sur les lignes de ravitaillement ennemies lors des offensives allemandes du printemps 1918. Jean-François Jannekeyn, officier d’active expérimenté, est désigné pour prendre le commandement de la BR 132 le 23 mai 1918 et mène ses hommes au combat dans ces grands raids. Il choisit pour mitrailleur un jeune officier d’active comme lui, le sous-lieutenant Eugène Weismann, grand blessé de guerre car amputé de l’extrémité de ses deux pieds suite à une blessure dans les tranchées. Un choix judicieux : c’est un mitrailleur très adroit déjà titulaire de deux victoires homologuées.

Promu au grade de capitaine le 15 août 1918, Jannekeyn va remporter sa première victoire aérienne en abattant avec Weismann un chasseur ennemi au cours d’une mission de bombardement au nord-est de Soissons. Les troupes allemandes refluent sous les coups des offensives alliées et la fin de la guerre approche... Le 14 septembre 1918 a lieu une mission marquante qui le fait entrer dans l’histoire : alors que le GB 4 en entier doit aller bombarder la gare de Conflans lors de l’offensive américaine sur le saillant de St-Mihiel, la chasse allemande intervient en masse pour contrer les bombardiers durant leur vol de retour où il font face à un fort vent de face. 5 Breguet 14 (dont 4 de l’escadrille BR 132, un de la BR 131) et 2 Caudron R XI d’escorte de l’escadrille C 46 manquent à l’appel après ce raid. Mais huit victoires aériennes seront homologuées aux équipages français, dont quatre à quatre équipages de l’escadrille BR 132, dont la paire Jannekeyn - Weisman. Bien que le journal de marche de la division aérienne précise qu’une victoire a été attribuée à chacun des quatre équipages, ceux-ci se verront tous homologuer les quatre victoires en commun. Ceci permet à Jean-François Jannekeyn de terminer la guerre avec cinq victoires homologuées, bien qu’il n’en tire aucune publicité car le seuil pour mentionné dans le communiqué aux armées était alors fixé à 10 victoires.

Officier d’active, Jean-François Jannekeyn va rester dans l’armée et se marier en 1919. Il quitte son escadrille en 1920 pour être affecté au 4e bureau de la direction de l’aéronautique. Parallèlement à sa carrière militaire, il pratique l’escrime à un bon niveau et fait partie de l’équipe française de sabre aux jeux Olympiques de 1924. Il va connaître plusieurs commandements durant l’entre-deux-guerres et progressivement monter dans la hiérarchie militaire, jusqu’au grade de général de brigade qui lui est donné le 1er mai 1939, peu avant d’être nommé chef de cabinet du ministre de l’air.

Il y reste jusqu’au 1er mai 1940 où il est nommé commandant des forces aériennes Orient-Méditerranée. C’est à ce poste, en Syrie, qu’il assiste à l’effondrement de la France et apprend la nouvelle de l’armistice signé par le gouvernement du maréchal Pétain. Il sera confirmé dans son poste par Vichy et va se retrouver à faire face à l’invasion des troupes britanniques aidés de troupes de la France Libre en juin et juillet 1941, au prétexte bien réel que Vichy a donné l’autorisation aux aviateurs allemands allant soutenir l’insurrection antibritannique en Irak.

Les aviateurs français de Syrie vont combattre les britanniques avec force et vont être un gage sérieux pour Vichy dans ses négociations avec les autorités allemandes. Jannekeyn va mettre un point d’honneur à refuser toute aide militaire des autorités allemandes qui « serait une redoutable compromission sans effets compensateurs, mieux vaut succomber seul qu’à deux. » Si ce fait est tout à son honneur, il fait montre d’une grave incompétence dans la campagne car la défaite militaire subie par l’armée de l’air n’avait rien d’inéluctable. Renforcée de plusieurs unités venues d’Afrique du Nord, elle a disposé d’une supériorité numérique comme qualitative sur les britanniques mais ceux-ci ont utilisé de meilleures tactiques de combat en n’hésitant pas à bombarder l’ennemi au sol, ce dont l’armée de l’air, qui en avait pourtant les moyens, n’a pas fait.

Jannekeyn est rapatrié en France et récompensé par Vichy d’une 3e étoile de général de division. Il est nommé le 23 février 1942 commandant de l’air à Alger, puis son destin bascule quand il accepte le poste de secrétaire d’état à l’Aviation dans le gouvernement de Pierre Laval, le 23 février 1942. Il doit dès lors s’engager dans l’engrenage de la collaboration et superviser les constructions aéronautiques, dont Vichy a négocié avec l’Allemagne la reprise en échange de la réservation d’une part substantielle de la production pour l’Allemagne. Ceci permet de combler les pertes dans les unités combattantes, même si les avions produits commencent à être périmés car les allemands refusent toute recherche. N’ayant aucun attrait pour les groupes collaborationnistes, Jannekeyn va s’employer à limiter la contagion de ces idées dans l’armée de l’air et faire espionner le commandant Costantini, aviateur favorable à une collaboration militaire avec l’Allemagne, pour éviter qu’il ne débauche des cadres de l’armée de l’air dans un quelconque mouvement.

Quand vient le débarquement allié en Afrique du Nord du 11 novembre 1942, les unités locales de l’armée de l’air vont opposer une farouche résistance pendant quelques jours. En métropole, la zone sud est envahie par les troupes allemandes et Jannekeyn conduit la négociation avec la Luftwaffe pour organiser une collaboration militaire qu’évoquent les allemands pour une défense commune du territoire national. Il semble y croire et prend des mesures pour limiter les évasions. Mais il est complètement dupé par les Allemands qui le 27 novembre 1942 prennent possession unilatéralement des bases de l’armée de l’air en saisissant tout le matériel et expulsant brutalement les aviateurs français. L’humiliation est totale pour l’armée de l’air qui n’a même pas effectué le moindre sabotage.

Pire encore, Jannekeyn reste à son poste de secrétaire d’état pour superviser la démobilisation de ses hommes. Se retrouvant à la tête d’une armée de l’air sans avions, il gère toujours la production aéronautique française, mais constate qu’elle est désormais entièrement au service de l’Allemagne. Espérant garder les vestiges d’une armée de l’air en conservant le commandement de bases et dépôts de stockage, il a un sursaut de fierté en refusant que les techniciens français travaillent pour aider les Allemands à remonter les matériels stockés qu’ils cherchent à utiliser pour leur compte. Les Allemands font alors miroiter à Vichy la reconstitution d’une armée française, dont un semblant d’armée de l’air limitée à la DCA, la défense passive et des services comme la météo ou le guet aérien. Au fur et à mesure des négociations, Jannekeyn constate que cette organisation mettrait totalement le personnel français sous les ordres des Allemands, ce qu’il refuse. Marginalisé dans les négociations, il n’est pas écouté par Pierre Laval et remet alors sa démission le 2 avril 1943.

Il n’exerce plus aucune responsabilité et se retire à son domicile, se cachant à libération car recherché par la police qui le retrouve le 3 mai 1947 et l’emprisonne à Fresnes dont il sort en liberté provisoire le 20 février 1948 alors qu’est instruit son procès pour collaboration. Quand le verdict est rendu le 27 janvier 1949, les grands procès de collaborateurs sont passés et la justice est plus clémente : il bénéficie d’un non-lieu pour les accusations d’atteinte à la sûreté intérieure et extérieure de l’Etat et d’indignité nationale. Il ressort libre vis à vis de la justice, mais a encore des comptes à rendre vis-à-vis de l’armée de l’air qui entame contre lui une action disciplinaire et le met à la retraite de manière anticipée. Il va tenter de se battre en justice contre cette décision mais perdre son procès qui se termine en 1952. Il ne fera dès lors plus parler de lui jusqu’à son décès survenu à Paris le 17 novembre 1971.

Sources

  • Fiche MdH
  • Dossier Léonore légion d’honneur
  • Journal officiel
  • "L’armée de l’air de Vichy 1940-1944", par Claude d’Abzac-Epezy.

Palmarès de Jean-François Jannekeyn

DateHeureEscadrilleAvion pilotéRevendiquéLieuNotes
1 22-août-18 BR 132 Breguet 14 Chasseur Secteur Margival / Laffaux / Vauxaillon Avec S/Lt Weismann en mitrailleur
2 14-sept.-18 BR 132 Breguet 14 Fokker D.VII Secteur Conflans / Jonville Avec S/Lt Weismann en mitrailleur, et 3 autres équipages de Breguet 14
3 14-sept.-18 BR 132 Breguet 14 Fokker D.VII Secteur Conflans / Jonville Avec S/Lt Weismann en mitrailleur, et 3 autres équipages de Breguet 14
4 14-sept.-18 BR 132 Breguet 14 Fokker D.VII Secteur Conflans / Jonville Avec S/Lt Weismann en mitrailleur, et 3 autres équipages de Breguet 14
5 14-sept.-18 BR 132 Breguet 14 Fokker D.VII Secteur Conflans / Jonville Avec S/Lt Weismann en mitrailleur, et 3 autres équipages de Breguet 14